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Les fausses-couches, ces immenses chagrins…

Ce sujet, cela fait maintenant plusieurs années que j’avais envie de l’aborder. Lorsque ce serait le moment.
Et bien voilà, ce moment est arrivé, et ce sujet, c’est celui de la fausse-couche. Je ne sais pas si l’on peut dire qu’il s’agit d’un tabou… ou si le mot est trop fort ou pas vraiment approprié.
Ce que je sais par contre, c’est qu’il s’agit d’une souffrance trop méconnue. Trop dérangeante. Une souffrance dont on ignore justement à quel point elle peut-être profonde avant de l’avoir vécue.

Pourtant, elle concerne 1 grossesse sur 4 et 1 femme sur 3… des chiffres bien loin d’être négligeables.
Des chiffres qui peuvent les rendre complètement banale et anodine. Que cela soit de la part du corps médical, des proches, des moins proches…

Pourtant lorsque l’on y est confrontée en tant que femme, en tant qu’homme aussi d’ailleurs, cela peut être une douleur inouïe.
Une douleur dans notre coeur, dans notre corps, dans toute notre vie. Une douleur qui prend toute la place.
Une douleur face au présent, à ce qui est. Face au futur et à ce qui ne sera pas. Pas comme on l’avait imaginé, pas maintenant, pas dans 7, 8 ou 9 mois.
Une douleur que l’on a envie de hurler au monde entier pour qu’il se rende compte.
Une douleur que l’on a envie d’afficher lorsque l’on nous pose ses fameuses questions qui peuvent sembler anodines, mais qui ne le sont tellement pas lorsque l’on a traversé ce genre de moment.
Ces fameux « alors et vous/toi, c’est pour quand ? » « il faudrait peut-être vous y mettre! », « et le petit 2ème alors ? ».
Ces questions qui sont finalement tellement brutales sans en avoir l’air.

Et puis, ce paradoxe et cette envie de ne pas en parler. Pour la rendre moins douloureuse, moins présente, moins vraie, cette fichue fausse couche.
Parce que l’on se dit que ce n’est pas possible. Parce qu’on ne l’avait pas encore annoncé cette belle nouvelle… on voulait attendre les 3 mois, par précaution, par superstition.
Et surtout parce que le peu de fois où l’on en a parlé, on s’est entendu dire… tout ce que l’on ne souhaite pas entendre et qui accentue encore notre douleur.
Pas dans des envies de nuire bien sûr. Pour rassurer. Mais de façon maladroite, inadéquate.
Ces « ça marchera la prochaine fois ne t’en fais pas », « mais au moins tu sais que ton corps fonctionne », « ça arrive à beaucoup », « etc
Toutes ces phrases qui se veulent aidantes et ne font que minimiser notre souffrance alors que l’on souhaite au contraire pouvoir la vivre et la ressentir pleinement.
Oh, je sais bien que cela ne part de mauvaises intentions… j’aurais peut-être prononcé l’une d’entre elles si je n’avais pas été confrontée à cette triste réalité.
Mais se souvenir lorsque l’on ne sait pas quoi dire, que des silences pleins d’amour et de compassion valent mille mots. Qu’une écoute bienveillante laissant s’exprimer nos émotions est ce qu’il y a de plus précieux.

Il y a aussi cette histoire de couple. Ces cris de douleurs et de rage, ces pleurs de tristesse, ces sentiments d’injustice. Cette culpabilité tellement immense, et inévitable.
Ces câlins qui réchauffent ou ce terrible vide affectif. Ces mots ou cette absence de mots. Ce besoin d’échanger chez l’un, et pas chez l’autre.
Cette incompréhension de vivre les choses de manières si différente, et en fait si normale. Lorsque l’une se sent responsable de tout et l’autre totalement impuissant.
Ces peurs et ces angoisses qui vous hantent… de ne jamais réussir à porter la vie. Du tout ou à nouveau. 

Et puis nous, dans notre corps de femme. Nous et notre ventre. Ce ventre que l’on avait peut-être commencé à chérir, à investir, à ressentir… ou au contraire pas réussi à créer de lien, ressentir un certain malaise et qui tout à coup abrite un petit être sans vie.
Notre ventre qui porte alors la mort, que l’on ne peut plus ni toucher, ni regarder. Et qui va devoir la porter quelques jours encore, puisque les délais avant les interventions sont souvent de plusieurs jours.
Sans parler des mots parfois brutaux et inhumais des médecins, gynécologues, échographistes… ou de leur absence de mots, et d’explication justement.
Cette façon de minimiser les gestes, les choses, le déroulé triste mais réel de ce qui va se passer.
De tout ce sang qui va s’écouler et des douleurs de notre corps à le laisser partir, ce petit être en devenir qui ne sera finalement pas.
Et puis parfois, il y aussi la chance de croiser des médecins et du personnel d’une grande humanité, dont le sourire et les mots comptent infiniment et nous accompagnent longtemps, dans cette lourde tristesse.

Enfin… il y a le sens. Ce qui est je l’admets est une vision toute personnelle. Mais qui pour moi a été et est encore salvatrice.
Je crois profondément que les épreuves, aussi douloureuses soient-elles ont une raison d’être.
Que nous avons toujours quelque chose à y apprendre. A comprendre. Sur nous même ou sur l’autre. Ce qui n’est PAS une occasion de culpabiliser encore plus.
Bien au contraire, c’est à mon sens une libération.
Et une opportunité de continuer à évoluer. Encore. D’avancer sur notre propre chemin de Vie et de croissance.
Alors, cette petite âme qui nous avait choisi, qu’est ce qu fait qu’elle n’a pas pu ou pas voulu rester ici et maintenant.
Qu’a-t-elle donc senti ? Quel déséquilibre dans ma vie a-t-elle mis en lumière ? Pour quoi est-elle venue me rendre visite ?
Parce que ce temps passé à ses côtés n’est pas vain, loin de là.
Jamais je ne pensais pouvoir dire cela et pourtant, cette petite âme, je la remercie infiniment aujourd’hui. De m’avoir rendue visite puis de s’être envolée.
Elle m’a permis de mesurer l’envie viscérale que j’avais de devenir maman.
Et surtout, elle m’a permis de prendre conscience d’une énorme source de violence dans ma vie.
D’oser enfin prendre les décisions qui allaient m’en défaire, de briser des chaînes.
Les réponses à ces questions ne sont pas forcément évidentes et nécessitent du temps.
Un accompagnement aussi parfois, lorsque le chemin est trop difficile à faire seule.
Après ou pendant notre processus de deuil, car cela en est un. Vraiment. Et c’est important de s’autoriser à le vivre ainsi.
Avec toute la patience, l’indulgence et l’amour du monde. Avec la présence d’êtres chers. D’autres femmes qui savent. De rituels qui apaisent.

En écrivant cet article, je pense et je me relie à toutes ces femmes qui ont traversé cette ou ces épreuves de vie.
Que ces quelques lignes puissent peut-être soulager, apaiser, relier, aider, mettre un baume autour de leur coeur.
Enfin, je souhaite que celles qui la vivront un jour aient la chance d’être entourées par d’autres, avec toute la compassion et l’amour qu’elles méritent.
Car non, une fausse-couche, ce n’est pas rien.

Si cet article te parle, le partager permettra peut-être d’aider d’autres femmes ou de donner de la visibilité à ce sujet encore trop méconnu.

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